Global Journal of Human Social Science, D: History, Archaeology and Anthroplogy, Volume 23 Issue 2

X. L e « M usée» S ous le S econd E mpire En 1858, le Prince Jérôme, chargé du Ministère de l’Algérie et des colonies, émettait de nouvelles instructions en matière de recherches archéologiques « noter avec soin, sur les cartes et plans de leur subdivision [officiers de bureaux topographiques] la direction des voies romaines, l’emplacement des ruines, des bornes milliaires, et de tous les monuments que l’on pourra découvrir. Ce travail sera d’une grande utilité pour les études archéologiques, et permettra, dans un prochain avenir, d’asseoir d’une manière définitive les bases d’une géographie complète de l’Afrique romaine ». La même année, il rendait obligatoire la création, dans chaque ville, de musées municipaux. L’idée de musée central à Alger, si chère à A. Berbrugger, est sitôt rattrapée par le besoin de décentralisation, qui donna un sens et une plus grande légitimité à l’établissement d’une Algérie coloniale distincte de la métropole. Le Second empire était annonciateur d’une volonté de dépassement de l’ordre ancien. Le maréchal Randon, gouverneur général de l’Algérie, fut appelé à développer une nouvelle politique d’investigation et de valorisation archéologiques. Il commença par rétablir, en 1854, la mission d’ «Inspecteur général des bâtiments civils en Algérie», confiée en 1847 à M. Charles Texier mais qui fut dissoute une année après. Elle fut reprise sous un nouveau libellé: «Inspection générale des monuments historiques et des musées archéologiques de l’Algérie» . C’est Berbrugger qui en occupa le poste en 1854. En 1856, sur instigation de Randon, fut créée la «Société Historique Algérienne», une société savante, dotée d’une revue scientifique, la «Revue africaine » . En guise d’exposé des motifs de la création de cette société savante et de sa revue africaine, Berbrugger, qui fut nommé président, écrivait ceci: « Il y a, en Europe, des hommes éminents dans la science historique et qui s’occupent du passé de l’Algérie avec une abondance de ressources littéraires que notre colonie ne possédera peut-être jamais. A notre tour, nous possédons ce qui leur manque ; nous avons les objets d’étude sous les yeux, et, pour ainsi dire, toujours à portée de la main. Cet avantage-là vaut bien l’autre ; et la conséquence à tirer de cet état de choses, c’est que le travailleur algérien n’est pas l’inutile doublure, mais le complément naturel de celui d’Europe. Chacun d’eux fera ce que l’autre ne peut faire, et leur réunion offrira la solution complète du problème d’organisation des études historiques à entreprendre sur l’Afrique septentrionale. Là se trouve la raison d’être de notre société et de notre journal ; là sera, nous osons l’espérer, la cause de notre succès ». Ces propos, qui reprennent un document circulaire de Randon - président honoraire – explicitent la nature du nouveau rapport à établir avec la Métropole: « vous avez les ressources littéraires», «nous avons les objets d’étude sous les yeux». Une forme de chantage déguisé qui va gouverner toute la politique de la recherche archéologique en Algérie. C’est dans ce contexte de renouveau que la Bibliothèque-Musée d’Alger passa du Département de la guerre au Ministère de l’instruction publique, par un arrêté du 16 aout 1848. Une plus grande régularité de fonctionnement et de budgétisation fut assurée aux deux établissements qui déménagèrent, une fois de plus, pour s’établir dans une maison mauresque, autrefois habitée par le consul américain Shaler, un palais donnant à la fois sur la mer et sur la «rue des Lotophages n°18 » , au quartier de la Marine. Ce palais n’existe plus. La Bibliothèque-Musée, s’était établie, ensuite, en 1863, dans l'ancienne résidence du Dey, à Dar Mustapha Pacha, palais de style mauresque, sur la rue de l’Etat-major où elle y demeura jusqu’en 1958, avant d’être transférée, dans des locaux modernes, au quartier des Tagarins, avenue actuelle du Dr Frantz Fanon. XI. L a B ibliothèque- M usée D ’alger: U n P remier B ilan En 1861 et devant les nécessités de bilan et d’objectifs de réalisation, un état des lieux de la Bibliothèque-Musée d’Alger fut établi par A. Berbrugger, dans lequel il déclina l’organigramme des deux établissements. La Bibliothèque était organisée en quatre sections (Imprimés, Manuscrits, Cartes et Plans; Papiers et documents divers) et le Musée aussi (Antiques; Monuments indigènes, épigraphiques et autres; Objets d’art arabe; Histoire naturelle). La section Antiques, la plus importante, était subdivisée en six provinces (Oran, Alger, Constantine, Tunisie, Tripolitaine, provenance inconnue). Il est utile d’examiner la consistance du fond littéraire de la Bibliothèque pour la seule section Manuscrit, en ayant à l’esprit la déclaration de Berbrugger, prononcée le 23 avril 1863, à la séance inaugurale de l’Assemblée générale de la Société Historique Algérienne: « Dans ce pays …sans savants, sans traditions savantes et même sans livres”. La section Manuscrit comptait, selon la présentation du même Berbrugger, 1100 manuscrits dont plus de 400 recueillis lors des expéditions de Mascara, Tlemcen et Constantine . « Ces 1100 volumes de manuscrits contiennent à peu près 3000 traités ou opuscules sur presque toutes les branches des connaissances humaines, du point de vue arabe. Un sixième de ces traités, etc., sont relatifs à la religion et la vie de Mahomet : là se classent plusieurs exemplaires du Coran, les divers livres de la Sonna le tout accompagné des exégèses habituelles… Après les ouvrages de théologie on compte parmi les plus nombreux ceux qui se rapportent à la législation et comprennent les textes Volume XXIII Issue II Version I 70 Global Journal of Human Social Science - Year 2023 © 2023 Global Journals The Museums of Algeria in the French Historiographical Field ( )D

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