Global Journal of Human Social Science, D: History, Archaeology and Anthroplogy, Volume 23 Issue 2

XIV. L e R apport A ccablant S ur les M usées A lgériens ( R . M . de la B lanchère) Le Rapport de La Blanchère sur la situation des musées algériens ainsi qu’un premier tome, sur la description du Musée d'Alger, de la série des « Musées et Collections de l'Algérie» ( 1890 ) , réalisé par M. Doublet, ancien membre de l'Ecole d'Athènes, furent remis, en 1890, au Ministre de l'instruction publique et des beaux- arts. Le rapport est un véritable pamphlet sur la pratique muséale en Algérie depuis 1830. Il est utile de reprendre ici, l’essentiel des observations et remarques qui y sont contenues, pour évaluer la nature et l’ampleur des manquements et des dommages constatés. Dans son introduction au sujet, La Blanchère avertissait qu’il n’avait pas la prétention de refaire les catalogues et les inventaires, en précisant, cependant, qu’ «un catalogue ne se fait utilement que quand tout est logé, classé, et rangé d'une manière définitive, ce qui n'a encore eu lieu nulle part» et que «cette comptabilité [inventaire] est l'affaire des conservateurs, et devrait être depuis longtemps tenue». Son travail consistait, disait-il, à « rendre un compte exact de ce que l'établissement [ musée ] renferme, et d'en rendre compte au public» . La première observation, d’ordre général, qui résume le diagnostic, est sans appel: «Les musées d'Algérie sont plus riches qu'on ne le pense, et plus riches qu'ils ne le paraissent. Ils devraient l'être cent fois plus… La millième partie des trésors qui ont été barbarement détruits, ou que l'on a laissés se perdre, depuis un demi-siècle, dans notre colonie, suffisait à former d'incomparables collections» . Sans le citer nommément, la critique visait directement A. Berbrugger «Elle [l’Algérie] n'a jamais eu de personnel capable, n'ayant pas d'autre soin que de sauvegarder les restes de son passé, et dévoué exclusivement à cette tâche unique. Il n'y a pas de Musée central ». Le Musée central «…n'est ni un musée de l'Algérie, ni un musée de la province d'Alger : une grosse part des morceaux qu'il contient, et presque les plus beaux, viennent de la Tunisie ». Il compare les musées de provinces à des cabinets de curiosités « [Ils] se sont enrichis au hasard, sans aucun plan, sans aucun ordre. Ils ne donnent nullement l'idée des antiquités du pays ». Le Musée de Constantine « contient presque autant de bibelots italiens que de trouvailles africaines. Il n'offre pas une inscription libyque, alors que presque tout le corps de cette épigraphie singulière vient de ce seul département … la collection lapidaire est-elle reléguée dans un square, exposée aux coups de cailloux des enfants, et ses pièces les plus importantes, quelques très belles inscriptions, sont-elles dans un coin perdu où la terre commence à les envahir ». Le Musée de Cherchell « est un fouillis, jeté par tas dans un vilain enclos, en plein air, si ce n'est qu'un hangar misérable abrite tant soit peu quelques superbes sculptures, recollées au hasard et groupées comme des moellons ». Le Musée de Bône quant à lui, « il serait mieux de n'en pas parler. Dans un magasin, demi-sous-sol, qui, par un soupirail, reçoit les balayures d'une cour d'école, se cachent sous une épaisse couche d'ordure quelques vitrines désemparées, où moisissent pêle-mêle des oiseaux empaillés, des antiquités, des échantillons de minéraux, et près desquelles sont posés des pierres et des marbres qu'il est impossible d'examiner» . Lorsqu’il procéda, par comparaison, en déclarant que «Nulle part, comme au Musée Alaoui, on n'a cherché à rappeler les cités anciennes de la province, chacune par quelque inscription, quelque monument typique, autour duquel se groupent les objets de même provenance; les emplacements les plus célèbres dans l'histoire de l'archéologie algérienne ne sont souvent représentés dans aucun des musées d'Algérie », La Blanchère s’était placé dans une situation paradoxale voire antinomique des objectifs d’une colonisation de peuplement, qui justifierait « l'indifférence des pouvoirs publics », selon ses propres propos: « Ni l'État ni les départements ni les villes n'ont accompli tout leur devoir. Il est tard aujourd'hui : on peut encore très bien faire, mais plus jamais on ne fera ce qui était facile autrefois» . XV. R . M . de la B lanchère: F ondateur D ’une M uséographie A lgérienne A l’invitation de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, l’Ecole française de Rome - active depuis 1875 - se mettait, pour la première fois, dès l’année 1889, sur l’orbite Nord-africaine. Il s’agissait surtout d’accueillir, parmi les doctorants et jeunes chercheurs agrées, pour des séjours d’études en Italie, les candidats éligibles à un destin Nord-africain, plus particulièrement algérien, selon des prédispositions et un profil qui correspondraient à la politique en vigueur en matière d’archéologie, de monuments et de musées. C’est par cette caractéristique, ajoutée à l’expérience acquise en Tunisie et au Rapport qu’il venait d’établir sur l’Algérie, que La Blanchère fut nommé, en 1891, Directeur du Musée d’Alger, poste qu’il occupa jusqu’en 1900, en s’employant à sa réorganisation selon les normes en vigueur de la muséographie, à l’image du Musée Alaoui de Tunis. Le Musée se voit séparé administrativement de la Bibliothèque. Nous sommes déjà loin de l’ère Berbrugger qui, rappelons le, avait été célébrée en grande pompe en 1865, au siège même de la Bibliothèque-Musée d’Alger, où Berbrugger, pour service rendu, était élevé à la dignité de commandeur de la Légion d'honneur par l’Empereur Napoléon lui- même, alors en voyage en Algérie. C’est le Ministre de Volume XXIII Issue II Version I 73 ( ) Global Journal of Human Social Science - Year 2023 D © 2023 Global Journals The Museums of Algeria in the French Historiographical Field

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