Global Journal of Human Social Science, D: History, Archaeology and Anthroplogy, Volume 23 Issue 2
l’Algérie. Gsell, Carcopino, Cagnat et Albertini se succédèrent à ce poste; pour poursuivre l'effort archéologique engagé jusque-là, dans l’ordre conceptuel et méthodologique convenu. Ils assureraient, à la fois, les missions d’inspection, d’enseignement à l’université et de direction du Musée des antiquités d’Alger. Une dizaine d’années plus tard, en 1923, une direction des antiquités et des missions archéologiques fut créée auprès du gouvernement général de l'Algérie. Elle permit d’asseoir un véritable dispositif d’administration et de gestion des musées et des missions archéologiques, mis sous le contrôle politique du gouvernement général de l’Algérie et l’ancrage et la caution scientifiques de l’Ecole française de Rome. XVIII. L es M usées D ’algérie : Q uel (s) A ncrage (s) J uridiques (s)? a) Les lois sur les monuments historiques L’essentiel de l’arsenal juridique métropolitain, appliqué ou étendu à l’Algérie, concernait davantage les monuments historiques, les sites et les fouilles archéologiques que les musées, les collections et les biens culturels mobiliers. Ces derniers ne semblent pas avoir captivé l’intérêt du législateur français, qui renvoyait le sujet à des niveaux réglementaires (décrets, arrêtés, circulaires). Il faut remonter aussi loin que 1887, jusqu’à la loi sur les monuments historiques, pour retrouver le premier ancrage légal relatif aux objets culturels mobiliers d’Algérie. Il s’agit de l’article 16 (chapitre IV), des « Dispositions spéciales à l'Algérie et aux pays de protectorat »», qui stipulait que « Dans cette partie de la France, la propriété des objets d'art ou d'archéologie, édifices, mosaïques, bas-reliefs, statues, médailles, vases, colonnes, inscriptions qui pourraient exister, sur et dans le sol des immeubles appartenant à l'État ou concédés par lui à des établissements publics ou à des particuliers, sur et dans les terrains militaires, est réservée à l'État» . Cette loi a été pensée, non pas dans le cadre strictement métropolitain, mais dans une perspective beaucoup plus large, englobant le contexte européen, celui des colonies et des protectorats, afin de contenir tous les aspects philosophiques, juridiques et institutionnels, qui mettaient en relation la protection des biens culturels et les acquis constitutionnels de la propriété privée – cheval de bataille de la IIIème République – Au cœur même des débats sur cette loi, intervenant au Senat, M. Bardoux, ancien Ministre de l’Instruction publique, qui devait faire rapport, signalait, déjà, «l’état déplorable dans lequel se trouvent les antiquités algériennes (41). Appuyé par tout un corpus de données et d’informations livrées, notamment, par M. L. Renier et M. L. Masqueray, il déclara, séance tenante: « Notre terre d’Afrique est, après l’Italie, le pays qui fournit le plus d’inscriptions romaines. Malheureusement, il y règne une véritable fureur de destruction et les monuments les plus intéressants sont l’objet des actes de dévastation les plus inexplicables et les plus barbares». Alors directeur de l’Ecole supérieure des lettres d’Alger, M. L. Masqueray exprimait le même regret en 1882: «L’indignation nous aurait poussé à recueillir, nous aussi, les épaves d’un naufrage dans lequel des villes entière disparaissent. On a fait de la chaux avec des statues de Caesarea (Cherchell), Naraggar, Thagora, Auzia sont englouties dans des casernes, j’ai vu scier les marbres du Temple d’Esculape; à Lambèse, les collections locales sont au pillage» (42). La loi du 30 mars 1887 sur les monuments historiques a cette singularité d’avoir introduit un mécanisme spécifique de protection des biens culturels mobiliers et immobiliers, appelé «classement», une sorte de limitation «déguisée» de la propriété de certains biens culturels. Cette loi devint inopérante une quinzaine d’années plus tard, notamment après la promulgation de la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Églises et de l’État et ses implications sur le patrimoine religieux. Elle fut remplacée par la loi du 31 décembre 1913 sur les monuments historiques, qui introduisit une conception nouvelle du droit de propriété, en étendant le classement au domaine privé. Ainsi, les biens culturels meubles, immeubles par nature et immeubles par destination, dont «la conservation présente, au point de vue de l’histoire ou de l’art un intérêt public», pouvaient faire l’objet d’un classement, y compris contre l’accord de leur propriétaire. L’intérêt public de la conservation se plaçant, désormais, au- dessus de la propriété qu’elle soit publique ou privée. S’agissant de l’Algérie, l’alinéa premier de l’article 36 de cette loi (Chapitre VI), dans les « dispositions diverses », stipulait que : «La présente loi pourra être étendue à l’Algérie et aux colonies par des règlements d’administration publique, qui détermineront dans quelles conditions et suivant quelles modalités elle y sera applicable». Le second alinéa du même articule précisait, cependant, que «Jusqu’à la promulgation du règlement concernant l’Algérie, l’article 16 de la loi du 30 mars 1887 restera applicable à ce territoire». Par cette disposition , l’Algérie se voyait exclue du champ d’application de cette loi, ne pouvant, donc, accéder aux avancées juridiques relatives, notamment, à la propriété privée. Les mesures d’ « inaliénabilité » et d’« imprescribilité », demeurèrent régis par l’article 10 de la loi de 1887: « Les objets classés et appartenant à l’Etat seront inaliénables et imprescriptibles». La loi 31 décembre 1913 avait introduit, dans les « Dispositions diverses », un article17 qui stipulait que « Les mêmes mesures seront étendues à tous les pays placés sous le protectorat de la France et dans lesquels il n’existe pas déjà une législation spéciale ». L’allusion Volume XXIII Issue II Version I 77 ( ) Global Journal of Human Social Science - Year 2023 D © 2023 Global Journals The Museums of Algeria in the French Historiographical Field
RkJQdWJsaXNoZXIy NTg4NDg=