Global Journal of Management and Business Research, F: Real Estate, Event and Tourism Management, Volume 22 Issue 3

Le Voyage Des Personnages Principaux Comme Symbole D’une Quête 40 Global Journal of Management and Business Research Volume XXII Issue III Version I Year 2022 ( ) F © 2022 Global Journals parce que je connais la réponse . Si je rentre maintenant, c’est la prison qui m’attend. C’est la même chose pour quiconque est jugé indésirable par les autorités. Je leur aie déplu. Je suis allée trop loin. J’ai pris trop d’importance (…) et maintenant, d’un coup de tampon, on m’a exilée. Moi et ma fille seules dans un monde occidental (…) qui nous est étranger » 30 L’allusion faite à l’expulsion de Myriam Makeba est une parenthèse pour mettre en exergue la réalité des thèmes abordés par les romancières ivoiriennes. Pour revenir à Sarah, nous retenons que le tourment amoureux que Tanko lui a imposé l’a conduit à l’incarcération. Au sortir du monde carcéral, elle perd son emploi et même ses amis: « Bien entendu, ses employeurs l’avaient rayée de leurs effectifs. Ils lui précisèrent même qu’elle devrait s’estimer heureuse de ne pas être poursuivie pour le préjudice moral causé à la compagnie. Ses collègues lui tournèrent le dos et tous ceux qu’elle considérait comme ses amis l’évitaient » . 31 « Avec la réalité qui venait de s’imposer à elle et qui la tourmentait davantage. Elle ruminait sans cesse son désespoir et sombrait progressivement dans la dépression. En fait, elle avait perdu goût de vivre et envisageait souvent de se suicider. C’est alors qu’elle avait entendu parler du monastère et qu’elle s’y était rendue. Comme poussée par une force irrésistible, une nuit où le désespoir était à son paroxysme » . L’adage populaire dit que c’est "dans les moments les plus difficiles de sa vie que l’on reconnaît ses vrais amis". Cette découverte peut être fatale. Car, s’apercevoir que ceux sur qui on a bâti sa confiance nous rejette dans de tels moments est difficilement supportable voire impossible pour certains. D’où le désespoir profond qui conduit soit à la folie ou au suicide des personnes qui en sont victimes. Sarah a vécu la même situation. Ses amis et collègues l’on rejeté. Au sortir de prison, elle a perdu son emploi. Toutes ces épreuves l’ont conduite dans une grande détresse. La solution pour elle est de se suicider. Se donner la mort est donc le seul remède à son mal. 32 Sarah se réfugie alors dans un univers monacal où elle bénéficie de réconfort, de paix et de soutient. Elle passe du désespoir à l’espoir, de l’envie de suicide à celle de vivre et d’aimer, car elle sait dorénavant que Dieu l’aime et qu’il ne l’abandonnerait jamais. Le monastère est un établissement où vivent des religieuses. Nous appuyant sur la dédicace de l’œuvre, nous pouvons dire qu’il s’agit ici du monastère Sainte Claire d’Abidjan-Abobo. La vie dans un monastère est faite de prière, de jeûne, de méditation de la parole de . 30 Myriam Makeba et James Hall, Myriam Makeba, une voie pour l’Afrique, op. cit , p. 129 31 Adjoua Flore Kouamé, La valse des tourments, op. cit., pp. 149-150 32 Ibedem, p. 150 Dieu, et de contemplations. Ces occupations d’ordre spirituel ne sont pas les seules activités des religieuses. Elles s’adonnent à de nombreuses autres tâches telles la culture maraîchère, la production de produits laitiers, de vin cuit et des activités artistiques, culturelles et éducatives. Sarah trouve, dans ce lieu, le repos et la quiétude. Cette reconnaissance qu’elle adresse à Mère Odile l’atteste : « Vous m’avez redonnez goût à la vie qui m’avez soutenue par votre tendresse et vos conseils. Vous qui en quelques mois, avez réussi à me consoler de mes parents trop tôt arrachés à mon affection » 33 V. C onclusion . La démarche des personnages principaux des œuvres des romancières ivoiriennes participe à la quête du bonheur. De ce fait, le voyage de ces personnages assimilable à une fuite ne doit pas être associé à un abandon, à une défaite mais plutôt à une victoire. Aller voir ailleurs pour acquérir les moyens requis et venir mettre fin à tous ces méfaits, ces abus et méchancetés sont une démarche de bravoure et non d’abandon, ni de peur. Pour un changement potable et profitable il faut agir dans le temps et l’espace. Cette option s’accorde à celle de Frantz Fanon, pour qui: « Tout problème humain demande à être considéré à partir du temps » 34 . Un temps qui ne fait pas obstruction à l’espace. En effet, L’investigation sur l’espace dans le corpus révèle son importance. Les modes de représentation adoptés par les romancières ivoiriennes permettent de déduire qu’avec des mots, des phrases, le récit conduit son espace en utilisant les lieux parfois réels, mais en leur donnant des significations internes. Kwabena Britwum dans son sous-titre, montre bien cet état de fait: « A tout récit correspond un espace où l’action du récit est censée se dérouler. Pour assurer sa crédibilité ou vraisemblance, le texte crée, au cours de son récit, son espace social » 35 . Se référant à cette citation, l’étude déduit que le voyage dans l’espace du corpus ne reflète pas des perceptions brutes, il est un langage. Son utilisation dépasse la simple indication d’un cadre spatial. Elle participe de l’économie du récit. Il peut s’établir une correspondance entre le paysage, le lieu de destination et l’état d’âme des personnages. C’est le cas de Johanne qui, malheureuse en ville se métamorphose en une fille pleinement heureuse au villag e 36 33 Adjoua Flore Kouamé, La valse des tourments, op. cit, pp. 197-198 34 Frantz Fanon, Peau noire, masques blancs, Paris, Seuil, 1975, p. 70 35 Britwum Kwabena, "La socialité du texte et/ou le texte du réel : pour une sociocritique du roman africain" in African perspective N°1, 1977, p. 137 36 Marie-Gisèle Aka, Les haillons de l’amour, op. cit., pp. 81- 121 .

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